“L’absence quasi-complète de dispositif formalisé d’accueil des débutants”.
C’est ainsi que la Revue internationale d’éducation de Sèvres caractérise les enseignants français débutants.
Et ce manque d’accueil, je l’ai vu pousser des contractuels à démissionner avant même d’avoir dispensé un seul cours.
Et je n’incrimine pas les personnels de direction, ni même les collègues ; ils ont déjà fort à faire.
Mais une chose est sûre : les contractuels ne sont pas accompagnés.
Tu es devenu contractuel, et c’est un nouveau départ pour toi.
Quand on y pense, prétendre à un nouvel emploi est une expérience valorisante.
C’est faire l’inventaire de ses compétences.
Se rappeler combien l’expérience peu significative peut être finalement sublimée.
Jouer le rôle d’investigateur en se renseignant sur la boîte et le poste.
Se plonger dans des cours pour actualiser ses connaissances.
Anticiper les questions pour créer de la confiance avec le recruteur.
Finalement, prétendre à un nouvel emploi, c’est une histoire de séduction.
C’est comme réserver un restaurant pour impressionner notre conquête, prendre l’apéritif afin de dénouer les langues, conseiller des plats typiques du restaurant et faire le connaisseur.
Tout ça pour éventuellement, débuter une relation ou obtenir un autre rendez-vous.
En tout état de cause, la séduction demande du temps…
Sauf que du temps, tu n’en as pas.
Les contractuels sont souvent appelés la veille pour le lendemain, ou dans le meilleur des cas pour la semaine suivante.
L’établissement et ses spécificités sont annoncés, et c’est au contractuel de jouer.
Et une fois le poste accepté, une armada de questions ronge le futur enseignant :
- Qui dois-je contacter en priorité ?
- Comment paraître crédible et professionnel face aux proviseurs ?
- Quelles ressources en ligne je peux trouver ?
- Comment les préparer à l'obtention du diplôme ?
- Existe-t-il des outils pour m'aider à structurer mes premiers cours ?
- Et les bulletins, comment bien les remplir ?
Ces questions, je les ai traitées puisque je réponds chaque année aux innombrables contractuels qui me contactent dans l’urgence pour dissiper leur doute et réduire leur (légitime) stress.
Et cela a littéralement changé la prise de poste des contractuels que j’accompagne.
Et quand bien même nous viendrions au lycée découvrir notre service, la peur peut nous envahir, voire nous faire abandonner.
Je me souviens de ce contractuel, arrivé fraîchement au lycée.
Notre équipe à l’époque avait une qualité : nous avions le don d’accueillir les nouveaux venus.
Une fois son service obtenu, ce contractuel était littéralement pris de panique à l’idée suivante : devoir enseigner en classe de BTS.
Il quémanda la modification de son emploi du temps. L'administration refusa.
Nous avions même proposé le changement de service pour que ce futur néo collègue puisse avoir des classes en pré bac, mais l’insistance se solda par un échec.
Résultat, après tous ces efforts et ajustements : le contractuel démissionna, avant même d’avoir dispensé un seul cours, malgré toutes les ressources mises à profit.
J’ai mis du temps à comprendre sa décision.
J’enseigne moi-même en BTS ou à l’université. J’appréhende mes classes pré-bac ou post bac de la même manière, avec certes les ajustements pédagogiques que cela suppose.
Ce n’est pas que ce contractuel n’avait pas suffisamment de connaissances pour enseigner. Je pensais à l’époque qu’il ne se sentait pas légitime.
La réalité, c’est qu’il manquait d’expérience.
Ce manque d’expérience que les recruteurs adorent marteler pour légitimer le refus d’un candidat à un poste.
Or, la légitimité et l’expérience sont deux choses distinctes. Sinon, tous les enseignants âgés seraient forcément incroyables.
En fait, ce n’est pas l’expérience qui nous rend légitime pour un poste.
Ce qui nous rend légitime, c’est notre capacité d’adaptation.
Et cette capacité d’adaptation, en tant qu’enseignant, elle se résume à ceci :
- trouver des ressources ;
- préparer son arrivée au lycée ;
- être efficient une fois au lycée ;
- être efficace face aux élèves.
C’est ainsi que chaque année, j'accompagne des contractuels complètement paniqués et qui souhaitent être crédibles face aux collègues et aux élèves.
Et cet accompagnement, je l’ai formalisé dans une formation rapide et efficace.